Pour ce troisième entretien, Regard sur les Etats-Unis est allé à la rencontre de Ted Stanger. Journaliste et écrivain, Ted Stanger a fait ses études à l’Université de Princeton et à la Sorbonne. Il fut le directeur des bureaux de l’hebdomadaire Newsweek à Bonn, Rome, Jérusalem puis Paris. Depuis près de 15 ans, il a posé ses valises en France et publié plusieurs ouvrages sur les Etats-Unis et son pays d'accueil. Son dernier ouvrage « Sacré Maison-Blanche ! » vient d’être publié aux Editions Michalon.
REU : Dans votre dernier ouvrage, vous vous placez en tant qu’observateur critique de la politique américaine, quelles sont les principaux reproches que vous adressez à l’égard du système électoral américain ?
T. Stanger : C’est tout d’abord le manque de transparence. En effet, aux Etats-Unis nous n’avons malheureusement pas une loi électorale unique mais une cinquantaine de lois disparates. Les règles électorales diffèrent en fonction des communes et des comtés. Cela affecte l’équité du système électoral dans son ensemble.
Deuxièmement, il faut préciser qu’il y a beaucoup de manigances dans la politique américaine. Les hommes politiques interviennent beaucoup pour contrôler voire décourager le vote des électeurs. En particulier, le parti républicain traine une longue tradition manipulatrice. Il a pu décourager les votes de certaines couches populaires de la population américaine. En effet, les membres du parti républicain estiment avec raison, que cette catégorie de la population est plus favorable au parti démocrate. C’est pour cette raison qu’ils mènent toutes sortes d’actions qui ne sont pas forcément illégales, mais qui peuvent décourager les électeurs. Par exemple en plaçant un policier à l’entrée du lieu où se déroule le scrutin. En effet et à titre d’exemple, dans certaines familles d’origine afro-américaine, il y a souvent un des membres qui a fait de la prison où qui est actuellement incarcéré.
Dernièrement, il y a eu une tentative d’instauration de vérification de la nationalité américaine avant le vote. Ceci peut poser de nombreux problèmes aux Etats-Unis. En France, l’acte de naissance est disponible assez facilement. En Amérique, il peut être difficile d’obtenir son acte de naissance si on n’habite loin de notre lieu de naissance (dans un Etat éloigné par exemple). Cette tentative illustre encore une fois, les tentatives destinées à empêcher les couches populaires d’aller voter.
REU : Lors d’un précédent ouvrage (Sacrés Américains !) vous décriviez déjà la complexité du système électoral américain, pensez-vous que celle-ci porte atteinte au caractère démocratique de l’élection ?
T. Stanger : C’est certain, oui. En effet, moins il y a de gens qui se déplacent pour aller voter, moins il y a de démocratie. En réalité, beaucoup d’américains ne sont pas forcément mécontents de ce système électoral. Une certaine couche de la population américaine est assez mobile. Certaines personnes déménagent de deux à trois fois par an. Certains d’entre eux ne votent pas voter par désobéissance civique. Quelques personnes ne souhaitent pas être appelé par exemple, pour participer à un jury populaire. Les électeurs estiment que si ces personnes ne votent pas, ce n’est pas grave en soit. Seules les personnes réellement impliquées ayant un certain civisme iront voter.
De plus, le jour du vote pour l’élection présidentielle sera un mardi, qui est un jour ouvrable. Beaucoup de personnes n’auront pas la possibilité ou le temps d’aller voter. Cette manière de filtrer les électeurs est très efficace. Alors qu’en France le taux de participation atteint généralement 60%, ce chiffre serait considéré comme anormalement élevé aux Etats-Unis pour une élection présidentielle.
REU : Selon-vous les superdélégués démocrates pourraient-ils accorder leur confiance à Hillary Clinton en dépit du vote populaire ?
T. Stanger : Jusqu’à présent, nous n’avons pas eu de précédents. La situation est totalement inédite. C’est tout simplement la première fois dans l’histoire américaine que les primaires sont utilisées pour vraiment départager les candidats. Lors des précédents scrutins, il suffisait de gagner dans les premiers Etats pour parvenir à décourager les autres candidats. En général, dès la mi-février, mi-mars, les autres candidats s’étaient désistés. Le système des primaires n’a pas été conçu pour départager les candidats qui obtiennent des résultats aussi serrés ou lorsqu’un des candidats insiste pour rester en course.
En plus de cela, les démocrates utilisent le système de la proportionnelle. Pour prendre un exemple concret, si un candidat démocrate gagne 55% des voies en Californie, il obtiendra environ 55% des délégués. Les résultats populaires très serrés se répercutent sur la répartition globale des délégués.
Le parti républicain n’a pas opté pour ce système là. Lorsqu’un candidat républicain remporte la majorité des voies en Californie, il obtient la totalité des délégués de l’Etat. Ce système a le mérite de départager plus rapidement les candidats. C’est ce type de système qui est utilisé pour l’élection générale de novembre.
REU : Vous sous-entendez avec humour dans votre ouvrage (Sacrés Américains !) que les américains déplorent l’affrontement entre les deux principales formations politiques, pourtant certains candidats se présentent sous les couleurs du parti libertarien ? Quelle est la véritable influence de ce parti dans la vie politique américaine ?
T. Stanger : En règle générale, les autres partis politiques ne jouent aucun rôle dans le jeu politique présidentiel aux Etats-Unis (et encore moins en ce qui concerne les autres élections). Les deux grands partis, en étant de vastes rassemblements, monopolisent la vie politique américaine.
Cependant, les deux grands partis ne sont pas des partis politiques au sens français du mot. Ce sont davantage des rassemblements. Au sein du parti démocrate, on trouve des conservateurs aussi conservateurs que certains membres du parti républicain et inversement. Ces partis politiques regroupent une variété de courant de pensée. Cette flexibilité idéologique explique à elle seule, la longévité de ces deux formations.
Il existe parfois un troisième candidat voire un quatrième qui peut troubler le jeu politique, mais le système électoral américain qui attribue un grand nombre de grands électeurs à celui qui obtient le plus de voies dans un Etat, à tendance à minimiser le rôle de ces candidats outsiders.
REU : Vous dénonciez les fraudes électorales lors de l’élection et de la réélection de George W. Bush, y a-t’il eu une amélioration du système électoral en 4 ans où risque t’on de voir se reproduire les mêmes incidents ?
T. Stanger : Non, depuis l’an 2000 il y a eu très peu de changement. En réalité le système électoral a été légèrement modernisé mais il reste tout de même de nombreuses manières différentes de voter : alors que dans certaines régions on vote en faisant son choix sur bulletin papier, certains bureau de vote sont équipés de machines électroniques. Chaque ville, chaque circonscription et chaque comté décident du système à utiliser.
Mais le principal problème réside dans le fait que les deux grands partis politiques ne souhaitent pas réformer ce système car ils ne s’y retrouvent pas, en quelque sorte. En plus de cela, nous n’avons pas de gens particulièrement bien préparés et formés pour l’organisation des élections. En France, il s’agit du Ministère de l’Intérieur qui supervise les élections. Aux Etats-Unis ce n’est pas le cas et le système est beaucoup plus compliqué.
Le système électoral américain se prête à des fraudes aux conséquences non négligeables. A titre d’exemple, même Jimmy Carter (qui a obtenu un prix Nobel de la Paix pour avoir supervisé des élections démocratiques dans des pays en voie de développement) a affirmé qu’il ne pourrait pas faire ce travail de supervision aux Etats-Unis. Le système électoral manque énormément de transparence.
Par conséquent, on peut considérer qu’il y a de la « triche » aux Etats-Unis. En principe, cette « triche » est relativement négligeable, mais dans certains cas (comme on a pu le voir en l’an 2000) cela peut tout changer. La même situation pourrait se répéter en 2008.
REU : Selon vous, le soutien affiché de John Edwards est-il un appui de poids à la candidature de Barack Obama ? Un ticket Obama / Edwards est-il envisageable ? (l’entretien a été réalisé le 16 mai 2008, depuis John Edwards a affirmé ne pas vouloir être le colistier de Barack Obama)
T. Stanger : A mon avis, un ticket Obama / Edwards n’est pas envisageable. Tout simplement parce qu’aux Etats-Unis, c’est un peu la limite de se présenter une fois à la vice-présidence. Dans le cas d’un échec, les candidats n’ont pas l’habitude de se représenter à nouveau. Cela s’apparenterait à une forme d’humiliation. De plus, je pense que John Edwards ne le souhaiterai pas.
Mais ce n’est qu’une supposition. Il peut parfois y avoir des accords entre les candidats.
Mais d’une manière générale, il faut savoir que le poste de vice-président est relativement inexistant aux Etats-Unis. Le vice-président est le président du Sénat, point final. Ce n’est que dans l’hypothèse ou le Président décide de lui déléguer certaines taches qu’il verra son rôle renforcé. Mais c’est vrai que depuis quelques années, le vice-président n’a plus un rôle honorifique. Par exemple, Bill Clinton avait confié plusieurs taches à Al Gore. De plus, Richard Cheney (l’actuel vice-président) a lui aussi eu un rôle assez important au sein de l’administration Bush, probablement à cause des faiblesses de l’actuel Président.
REU : En cas de victoire de Barack Obama à l’investiture du parti démocrate, quelles seront les reconversions possibles pour Hillary Clinton ? Certains parlent déjà d’une candidature lors des prochaines élections présidentielles, est-ce envisageable ?
T. Stanger : Il est évident que les spéculations vont bon train en ce moment à propos du destin d’Hillary Clinton. Elle est donnée perdante par pratiquement la totalité des analystes aux Etats-Unis. Dans son intérêt et selon les dernières rumeurs, Hillary Clinton souhaiterait la défaite de Barack Obama au mois de novembre. En effet, dans cette hypothèse, elle pourrait se représenter au mois de novembre contre John McCain qui aurait alors 76 ans !
Néanmoins, je pense qu’Hillary Clinton préfèrerait clairement se présenter en 2008, plutôt que d’attendre 4 ans. La question est de savoir si son abandon pourrait lui rapporter quelque chose ?
On parle actuellement de fait qu’elle pourrait se retourner vers Barack Obama pour effacer sa dette de campagne (environ 20 millions de $) et pourrait lui demander d’accepter d’intégrer dans son programme quelques propositions de sa campagne, comme par exemple l’universalité du système de protection sociale. Jusque là, Barack Obama ne l’a pas encore accepté.
REU : Quels sont les points forts et les points faibles de John McCain et de Barack Obama dans la perspective de l’élection présidentielle ?
T. Stanger : Tout d’abord, en ce qui concerne John McCain, il faut savoir qu’il va faire campagne comme un « vrai américain ». Ses publicités de campagne commencent d’ailleurs à aller en ce sens. C’est un Blanc, de souche américaine qui va être opposé à un candidat métis dont le père était Kenyan. Le message est clairement dirigé vers une partie de la population américaine parfois encore très raciste dans certaines régions. Certains électeurs ne souhaiteront pas d’un Président qui a vécu autant de temps à l’étranger comme Barack Obama. Tout ceci est bien entendu un peu ironique car il faut savoir que John McCain est lui-même né à l’étranger. Il est né de parents américains à l’étranger (son père était militaire).
En revanche, John McCain est incompétent sur tous les sujets relatifs à l’économie. Il le dit lui-même : il ne comprend pas l’économie nationale. Mais nul ne doute qu’il va se faire conseiller sur ce point. L’autre problème pour John McCain, c’est l’Irak. Il y a quelques jours, il a affirmé pour la première fois que s’il était élu Président, il essayera de retirer une grande partie de l’armée américaine avant 2013. Il s’agit de la première intervention du candidat en ce sens. Il s’agit d’un des problèmes les plus sérieux pour sa candidature. Cette guerre est devenue extrêmement impopulaire outre-Atlantique. Près de 60% des américains y sont désormais opposés.
Autre problème pouvant affecter sa campagne : il ne faudrait pas que les hostilités Irakiennes reprennent en octobre (juste avant le scrutin). Dans cette hypothèse, le candidat pourrait être discrédité.
Quant à Barack Obama, il possède un très grand talent d’orateur. C’est un « beau parleur » et ce n’est pas chose courante aux Etats-Unis. Il sait inspirer les gens : son parcours personnel mérite le respect. Il s’est fait tout seul. Il n’est pas issu d’une famille riche ou même d’une quelconque dynastie.
Mais les républicains vont creuser son passé politique dans l’Illinois. Ils vont l’étudier minutieusement de manière à relever les différents éléments qu’ils pourraient retenir contre lui.
Tout reste donc possible en novembre prochain.
REU : Dans votre dernier ouvrage, vous vous placez en tant qu’observateur critique de la politique américaine, quelles sont les principaux reproches que vous adressez à l’égard du système électoral américain ?
T. Stanger : C’est tout d’abord le manque de transparence. En effet, aux Etats-Unis nous n’avons malheureusement pas une loi électorale unique mais une cinquantaine de lois disparates. Les règles électorales diffèrent en fonction des communes et des comtés. Cela affecte l’équité du système électoral dans son ensemble.
Deuxièmement, il faut préciser qu’il y a beaucoup de manigances dans la politique américaine. Les hommes politiques interviennent beaucoup pour contrôler voire décourager le vote des électeurs. En particulier, le parti républicain traine une longue tradition manipulatrice. Il a pu décourager les votes de certaines couches populaires de la population américaine. En effet, les membres du parti républicain estiment avec raison, que cette catégorie de la population est plus favorable au parti démocrate. C’est pour cette raison qu’ils mènent toutes sortes d’actions qui ne sont pas forcément illégales, mais qui peuvent décourager les électeurs. Par exemple en plaçant un policier à l’entrée du lieu où se déroule le scrutin. En effet et à titre d’exemple, dans certaines familles d’origine afro-américaine, il y a souvent un des membres qui a fait de la prison où qui est actuellement incarcéré.
Dernièrement, il y a eu une tentative d’instauration de vérification de la nationalité américaine avant le vote. Ceci peut poser de nombreux problèmes aux Etats-Unis. En France, l’acte de naissance est disponible assez facilement. En Amérique, il peut être difficile d’obtenir son acte de naissance si on n’habite loin de notre lieu de naissance (dans un Etat éloigné par exemple). Cette tentative illustre encore une fois, les tentatives destinées à empêcher les couches populaires d’aller voter.
REU : Lors d’un précédent ouvrage (Sacrés Américains !) vous décriviez déjà la complexité du système électoral américain, pensez-vous que celle-ci porte atteinte au caractère démocratique de l’élection ?
T. Stanger : C’est certain, oui. En effet, moins il y a de gens qui se déplacent pour aller voter, moins il y a de démocratie. En réalité, beaucoup d’américains ne sont pas forcément mécontents de ce système électoral. Une certaine couche de la population américaine est assez mobile. Certaines personnes déménagent de deux à trois fois par an. Certains d’entre eux ne votent pas voter par désobéissance civique. Quelques personnes ne souhaitent pas être appelé par exemple, pour participer à un jury populaire. Les électeurs estiment que si ces personnes ne votent pas, ce n’est pas grave en soit. Seules les personnes réellement impliquées ayant un certain civisme iront voter.
De plus, le jour du vote pour l’élection présidentielle sera un mardi, qui est un jour ouvrable. Beaucoup de personnes n’auront pas la possibilité ou le temps d’aller voter. Cette manière de filtrer les électeurs est très efficace. Alors qu’en France le taux de participation atteint généralement 60%, ce chiffre serait considéré comme anormalement élevé aux Etats-Unis pour une élection présidentielle.
REU : Selon-vous les superdélégués démocrates pourraient-ils accorder leur confiance à Hillary Clinton en dépit du vote populaire ?
T. Stanger : Jusqu’à présent, nous n’avons pas eu de précédents. La situation est totalement inédite. C’est tout simplement la première fois dans l’histoire américaine que les primaires sont utilisées pour vraiment départager les candidats. Lors des précédents scrutins, il suffisait de gagner dans les premiers Etats pour parvenir à décourager les autres candidats. En général, dès la mi-février, mi-mars, les autres candidats s’étaient désistés. Le système des primaires n’a pas été conçu pour départager les candidats qui obtiennent des résultats aussi serrés ou lorsqu’un des candidats insiste pour rester en course.
En plus de cela, les démocrates utilisent le système de la proportionnelle. Pour prendre un exemple concret, si un candidat démocrate gagne 55% des voies en Californie, il obtiendra environ 55% des délégués. Les résultats populaires très serrés se répercutent sur la répartition globale des délégués.
Le parti républicain n’a pas opté pour ce système là. Lorsqu’un candidat républicain remporte la majorité des voies en Californie, il obtient la totalité des délégués de l’Etat. Ce système a le mérite de départager plus rapidement les candidats. C’est ce type de système qui est utilisé pour l’élection générale de novembre.
REU : Vous sous-entendez avec humour dans votre ouvrage (Sacrés Américains !) que les américains déplorent l’affrontement entre les deux principales formations politiques, pourtant certains candidats se présentent sous les couleurs du parti libertarien ? Quelle est la véritable influence de ce parti dans la vie politique américaine ?
T. Stanger : En règle générale, les autres partis politiques ne jouent aucun rôle dans le jeu politique présidentiel aux Etats-Unis (et encore moins en ce qui concerne les autres élections). Les deux grands partis, en étant de vastes rassemblements, monopolisent la vie politique américaine.
Cependant, les deux grands partis ne sont pas des partis politiques au sens français du mot. Ce sont davantage des rassemblements. Au sein du parti démocrate, on trouve des conservateurs aussi conservateurs que certains membres du parti républicain et inversement. Ces partis politiques regroupent une variété de courant de pensée. Cette flexibilité idéologique explique à elle seule, la longévité de ces deux formations.
Il existe parfois un troisième candidat voire un quatrième qui peut troubler le jeu politique, mais le système électoral américain qui attribue un grand nombre de grands électeurs à celui qui obtient le plus de voies dans un Etat, à tendance à minimiser le rôle de ces candidats outsiders.
REU : Vous dénonciez les fraudes électorales lors de l’élection et de la réélection de George W. Bush, y a-t’il eu une amélioration du système électoral en 4 ans où risque t’on de voir se reproduire les mêmes incidents ?
T. Stanger : Non, depuis l’an 2000 il y a eu très peu de changement. En réalité le système électoral a été légèrement modernisé mais il reste tout de même de nombreuses manières différentes de voter : alors que dans certaines régions on vote en faisant son choix sur bulletin papier, certains bureau de vote sont équipés de machines électroniques. Chaque ville, chaque circonscription et chaque comté décident du système à utiliser.
Mais le principal problème réside dans le fait que les deux grands partis politiques ne souhaitent pas réformer ce système car ils ne s’y retrouvent pas, en quelque sorte. En plus de cela, nous n’avons pas de gens particulièrement bien préparés et formés pour l’organisation des élections. En France, il s’agit du Ministère de l’Intérieur qui supervise les élections. Aux Etats-Unis ce n’est pas le cas et le système est beaucoup plus compliqué.
Le système électoral américain se prête à des fraudes aux conséquences non négligeables. A titre d’exemple, même Jimmy Carter (qui a obtenu un prix Nobel de la Paix pour avoir supervisé des élections démocratiques dans des pays en voie de développement) a affirmé qu’il ne pourrait pas faire ce travail de supervision aux Etats-Unis. Le système électoral manque énormément de transparence.
Par conséquent, on peut considérer qu’il y a de la « triche » aux Etats-Unis. En principe, cette « triche » est relativement négligeable, mais dans certains cas (comme on a pu le voir en l’an 2000) cela peut tout changer. La même situation pourrait se répéter en 2008.
REU : Selon vous, le soutien affiché de John Edwards est-il un appui de poids à la candidature de Barack Obama ? Un ticket Obama / Edwards est-il envisageable ? (l’entretien a été réalisé le 16 mai 2008, depuis John Edwards a affirmé ne pas vouloir être le colistier de Barack Obama)
T. Stanger : A mon avis, un ticket Obama / Edwards n’est pas envisageable. Tout simplement parce qu’aux Etats-Unis, c’est un peu la limite de se présenter une fois à la vice-présidence. Dans le cas d’un échec, les candidats n’ont pas l’habitude de se représenter à nouveau. Cela s’apparenterait à une forme d’humiliation. De plus, je pense que John Edwards ne le souhaiterai pas.
Mais ce n’est qu’une supposition. Il peut parfois y avoir des accords entre les candidats.
Mais d’une manière générale, il faut savoir que le poste de vice-président est relativement inexistant aux Etats-Unis. Le vice-président est le président du Sénat, point final. Ce n’est que dans l’hypothèse ou le Président décide de lui déléguer certaines taches qu’il verra son rôle renforcé. Mais c’est vrai que depuis quelques années, le vice-président n’a plus un rôle honorifique. Par exemple, Bill Clinton avait confié plusieurs taches à Al Gore. De plus, Richard Cheney (l’actuel vice-président) a lui aussi eu un rôle assez important au sein de l’administration Bush, probablement à cause des faiblesses de l’actuel Président.
REU : En cas de victoire de Barack Obama à l’investiture du parti démocrate, quelles seront les reconversions possibles pour Hillary Clinton ? Certains parlent déjà d’une candidature lors des prochaines élections présidentielles, est-ce envisageable ?
T. Stanger : Il est évident que les spéculations vont bon train en ce moment à propos du destin d’Hillary Clinton. Elle est donnée perdante par pratiquement la totalité des analystes aux Etats-Unis. Dans son intérêt et selon les dernières rumeurs, Hillary Clinton souhaiterait la défaite de Barack Obama au mois de novembre. En effet, dans cette hypothèse, elle pourrait se représenter au mois de novembre contre John McCain qui aurait alors 76 ans !
Néanmoins, je pense qu’Hillary Clinton préfèrerait clairement se présenter en 2008, plutôt que d’attendre 4 ans. La question est de savoir si son abandon pourrait lui rapporter quelque chose ?
On parle actuellement de fait qu’elle pourrait se retourner vers Barack Obama pour effacer sa dette de campagne (environ 20 millions de $) et pourrait lui demander d’accepter d’intégrer dans son programme quelques propositions de sa campagne, comme par exemple l’universalité du système de protection sociale. Jusque là, Barack Obama ne l’a pas encore accepté.
REU : Quels sont les points forts et les points faibles de John McCain et de Barack Obama dans la perspective de l’élection présidentielle ?
T. Stanger : Tout d’abord, en ce qui concerne John McCain, il faut savoir qu’il va faire campagne comme un « vrai américain ». Ses publicités de campagne commencent d’ailleurs à aller en ce sens. C’est un Blanc, de souche américaine qui va être opposé à un candidat métis dont le père était Kenyan. Le message est clairement dirigé vers une partie de la population américaine parfois encore très raciste dans certaines régions. Certains électeurs ne souhaiteront pas d’un Président qui a vécu autant de temps à l’étranger comme Barack Obama. Tout ceci est bien entendu un peu ironique car il faut savoir que John McCain est lui-même né à l’étranger. Il est né de parents américains à l’étranger (son père était militaire).
En revanche, John McCain est incompétent sur tous les sujets relatifs à l’économie. Il le dit lui-même : il ne comprend pas l’économie nationale. Mais nul ne doute qu’il va se faire conseiller sur ce point. L’autre problème pour John McCain, c’est l’Irak. Il y a quelques jours, il a affirmé pour la première fois que s’il était élu Président, il essayera de retirer une grande partie de l’armée américaine avant 2013. Il s’agit de la première intervention du candidat en ce sens. Il s’agit d’un des problèmes les plus sérieux pour sa candidature. Cette guerre est devenue extrêmement impopulaire outre-Atlantique. Près de 60% des américains y sont désormais opposés.
Autre problème pouvant affecter sa campagne : il ne faudrait pas que les hostilités Irakiennes reprennent en octobre (juste avant le scrutin). Dans cette hypothèse, le candidat pourrait être discrédité.
Quant à Barack Obama, il possède un très grand talent d’orateur. C’est un « beau parleur » et ce n’est pas chose courante aux Etats-Unis. Il sait inspirer les gens : son parcours personnel mérite le respect. Il s’est fait tout seul. Il n’est pas issu d’une famille riche ou même d’une quelconque dynastie.
Mais les républicains vont creuser son passé politique dans l’Illinois. Ils vont l’étudier minutieusement de manière à relever les différents éléments qu’ils pourraient retenir contre lui.
Tout reste donc possible en novembre prochain.
2 commentaires:
Les remarques de Ted Stanger sur le système électoral américain me rappellent la thèse d'un politologue français selon laquelle le mode de scrutin utilisé est l'élément décisif dans la vie politique d'un pays. Et l'on voit dans le cas d'un pays comme Israël quelle influence il peut avoir sur l'équilibre d'une région du monde.
Merveilleux
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