Regard sur les Etats-Unis

jeudi 25 juin 2009

Réforme de la régulation financière : effet d’annonce ou véritable remise à plat du système ?

Barack Obama vient de présenter le 17 juin 2009, la « plus vaste réforme du système financier depuis les années 30 », selon ces propres termes. S’agit-il d’un véritable projet de refonte du monde de la finance ou d’un simple effet d’annonce ? Une chose est sûre : il est encore trop tôt pour répondre de manière catégorique à cette question. Mais les nombreuses réactions des éditorialistes et autres experts économiques illustrent parfaitement l’importance qu’ils accordent à cette problématique.

Examinons succinctement les points essentiels du projet de réforme :
1 - La Réserve fédérale (FED) se voit attribuer un nouveau rôle : les plus grandes institutions financières américaines seront désormais placées sous la tutelle de la FED. Cette disposition devrait permettre au régulateur de prévenir les risques systémiques. Le pouvoir de la Réserve fédérale est donc particulièrement étendu et regroupe à présent des institutions de nature très diverses (banques, sociétés de crédit, assureurs…). Ces établissements seront assujettis à des règles plus strictes en matière de capitaux propres (ratio Tier-1). La FED disposera du pouvoir d’évaluation des risques pris par ces établissements. La banque centrale se trouvera également délestée de certaines de ses compétences périphériques.
2- Une agence de protection des consommateurs et des investisseurs (la Consumer Financial Protection Agency) va être créée : cette agence devrait notamment s’intéresser aux prêts subprimes proposés par les courtiers en crédits hypothécaires. Elle disposerait d’un pouvoir règlementaire, pourrait créer et interdire plusieurs produits financiers, étudier des sociétés et prononcer des sanctions.
3- La titrisation va faire l’objet d’une réforme : les banques devront conserver dans leurs bilans au moins 5% des crédits qu’elles titrisent. De ce fait, les établissements financiers ne pourront se soustraire entièrement au risque de crédit. La titrisation est une technique financière permettant de transférer à des investisseurs des actifs financiers (tels que des créances) en les transformant en des titres financiers émis sur les marchés de capitaux.
4- L’Office of Thrift Supervision va être supprimé : l’autorité de supervision des caisses d’épargne va disparaître à la suite de la faillite de la plus grosse caisse américaine durant la crise des subprime : Washington Mutual. Il sera fusionné avec l’Office of Comptroller of the Currency pour former le National Bank Supervisor.
5- Le Trésor présidera le Conseil de surveillance des services financiers ou Conseil des superviseurs (le Financial Services Oversight Council) : en collaboration avec la FED, il devra ainsi anticiper la création des bulles spéculatives de manière à prévenir les risques systémiques. Ce conseil sera composé du président de la Réserve fédérale, des directeurs du National Bank Supervisor et de la Consumer Financial Protection Agency, des présidents de la Securities and Exchange Commission (SEC) et de la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) et le directeur de la Federal Housing Finance Agency (FHFA). C’est ce conseil qui décidera des établissements qui tomberont sous la tutelle de la Réserve fédérale (FED).
Reste à savoir si dans les faits, ces multiples propositions suffiront à prévenir une nouvelle crise financière. Sur ce point, et malgré le catalogue de réforme préconisé par l’exécutif, rien n’est moins sûr…

dimanche 14 juin 2009

L’aggravation du déficit public peut-elle remettre en question la réforme du système de santé ?


C’est LA question taboue du moment Outre-Atlantique. Si l’on se réfère aux affirmations du président américain et à ses promesses de campagne, la réforme du système de santé pourrait être réalisée d’ici la fin de l’année. Pourtant, bien que Barack Obama en ait fait l’un de ses principaux arguments de campagne, l’instauration d’une couverture maladie universelle risque de se heurter à de nombreux obstacles, aussi bien de nature idéologique qu’économique.

D’un point de vue idéologique tout d’abord, les américains n’ont jamais été particulièrement attiré par la création d’une couverture maladie universelle assortie de l’interventionnisme étatique. La précédente administration démocrate au pouvoir (Clinton) avait d’ailleurs échoué sur ce point, pourtant vigoureusement défendu par la femme du président. Les républicains, quant à eux, dénoncent une socialisation de leur système de santé.
D’un point de vue économique d’autre part, le moment est plutôt mal choisi pour annoncer cette réforme. Du fait de l’adoption du plan de relance, le déficit public américain quadruplera cette année pour atteindre près de 13% du produit intérieur brut. Selon les premières estimations, la réforme du système de santé pourrait coûter près de 1 000 milliards de dollars. A l’heure actuelle, près de 635 milliards de dollars seraient d’ores et déjà provisionnés sur le budget 2010. Reste à trouver les 365 milliards restants ? L’administration Obama vient d’annoncer hier, qu’un peu plus de 300 milliards devraient être économisés durant les 10 prochaines années dans les grands programmes… de santé publique tels que Medicare ou Medicaid.
De cette manière, le gouvernement américain cherche à démontrer que la réforme du système de santé ne devrait pas contribuer à accroître les déficits publics. Cette position est très largement attaquée par le camp républicain, qui se base notamment sur les affirmations de l’American Medical Association qui estime que la création d’une couverture maladie contribuerait à faire exploser les coûts en matière de santé publique.
Si l’on se réfère aux promesses de campagne et aux déclarations de Barack Obama le nouveau système de santé devrait donner une couverture médicale à près de 46 millions d’américains qui en sont aujourd’hui dépourvus, mais également de permettre de réduire de moitié le déficit public d’ici 2013.
Actuellement, la plupart des américains sont couverts par une assurance maladie financée par leur employeur. Néanmoins, il existe des programmes spécifiques, particulièrement contrôlés, destinés à couvrir les dépenses de santé des plus démunis, des handicapés, des anciens combattants et des personnes âgées.
La vidéo de l'intervention hebdomadaire de Barack Obama consacrée à la réforme du système de santé (publiée le 13 juin 2009) :
 

Pour en savoir plus :
- le site de l'administration Obama de présentation de la réforme du système de santé
- le site de l'American Medical Association
- une étude de l'American Medical Association portée sur la réduction des coûts du système de santé américain 

jeudi 11 juin 2009

Où en sont les républicains ?


Après avoir perdu la majorité au sein des deux chambres parlementaires et l’élection présidentielle de 2008, où en sont désormais les républicains ? Comme à la suite de chaque défaite électorale, un parti a besoin de se reconstruire et laisse place à une période de transition au cours de laquelle les principaux ténors de la formation politique cherchent à s’imposer.

Pourtant si l’on en croit les résultats d’un sondage publié cette semaine par l’institut Gallup pour Usa Today, aucun dirigeant du parti ne se détache réellement. L’étude révèle que près de 52% des personnes interrogées sont incapables de se prononcer sur la question de savoir qui est le principal leader du parti ?
Parmi les sondés ayant répondu, près de 13% d’entre eux estiment que Rush Limbaugh serait la personne la plus influente au sein du parti. M. Limbaugh est l’animateur radio le plus écouté du pays (son audience quotidienne s’élève à près de 13,5 millions d’auditeurs). Son émission, diffusée sur le network Premiere Radio, lui permet de commenter l’actualité d’un point de vue conservateur. Il est suivi de Dick Cheney, John McCain et de Newt Gingrich (l’ancien speaker de la Chambre des représentants).
Autre enseignement de ce sondage : seuls 34% des américains auraient une opinion favorable du parti républicain, contre 53% pour le parti démocrate. Il s’agit d’un seuil particulièrement faible pour la droite américaine qui souligne la nécessité de se réformer au plus vite. Plus grave encore, près de 33% des républicains ont une opinion défavorable de leur propre formation politique (à comparer aux 4% de démocrates ayant une opinion défavorable de leur parti).
Pour résumer, le parti républicain est à ce jour totalement divisé. Deux courants de pensée s’opposent frontalement. Suite à la défaite du 4 novembre 2008, certains estiment que le parti s’est positionné trop au centre de l’échiquier politique américain (une position notamment défendue par Rush Limbaugh). Selon ce courant, le parti républicain devrait revenir à la défense des idées conservatrices. Cette position semble être celle de la majorité des membres du parti républicain. En revanche, une minorité de républicains estiment que le parti n’arrivera à se relever qu’en assouplissant certaines de ses positions afin de récupérer les voix des électeurs centristes (ou modérés). Vous l’aurez compris, l’opposition est radicale et les débats risquent d’être animés dans les prochaines semaines.
En effet, si le parti républicain se retrouve actuellement au plus bas dans les sondages et dans les urnes et paraît particulièrement affaibli, nul n’est censé ignorer que la politique est cyclique et que viendra un temps où les démocrates connaitront les mêmes déboires… L’histoire est là pour le rappeler, le parti républicain se reconstruira lorsque les démocrates commettront des excès. La vie politique n’est qu’un éternel recommencement.
Pour en savoir plus :
- le site du parti républicain
- le site du Rush Limbaugh Show
- le site de John McCain
- le site Newt Gingrich

dimanche 7 juin 2009

Etats-Unis / monde musulman : une incompréhension mutuelle

Alors que le président américain vient d’achever sa tournée au Proche-Orient en prononçant son discours historique du Caire, la route reste longue vers un apaisement des relations entre les Etats-Unis et le monde arabo-musulman.

Parfaite illustration de l’incompréhension mutuelle entre ces deux parties du monde, le sondage réalisé par l’institut Opinion Research Corporation pour la chaine de télévision CNN entre le 14 et le 17 mai 2009.
Selon les résultats de ce sondage, seul 1/5 des américains auraient une opinion favorable des pays musulmans. Ce chiffre est à rapprocher des 46% d’américains qui en auraient une opinion défavorable. Ce dernier nombre est d’ailleurs en augmentation par rapport à celui du précédent sondage réalisé en 2002 pour la chaine (41%). Du côté des musulmans, l’heure n’est pas encore à la confiance, malgré l’élection de Barack Obama. Bien que leur opinion ait légèrement évolué depuis l’accession au pouvoir du premier président afro-américain, leur sentiment de méfiance envers les Etats-Unis demeure.
La marge d’erreur de ce sondage est de plus ou moins 3%.
A eux seuls, ces quelques chiffres justifient le discours du Caire de Barack Obama

vendredi 5 juin 2009

Discours de Barack Obama sur la situation au Proche-Orient (Discours du Caire)

Voici la vidéo du discours prononcé par Barack Obama au Caire sur la situation au Proche-Orient :


Durée de la vidéo : 51 minutes 37 secondes.
Date : 4 juin 2009.
Lieu : Université du Caire.
Traduction réalisée par : Public Sénat.

jeudi 4 juin 2009

Discours du Caire : la tentative de séduction de Barack Obama

Particulièrement attendu par l’ensemble de la communauté internationale, le discours de Barack Obama au monde musulman restera dans les mémoires. Plus que le contenu de son intervention, c’est avant tout la forme et la méthode du président américain qui demeure inédite. En prononçant son discours à l’Université du Caire devant plus de 3 000 invités, Barack Obama a tenu, une nouvelle fois, à marquer sa différence d’approche par rapport à celle de l’administration Bush.

S’il ne fallait retenir qu’une phrase de son discours ce serait celle-ci : Barack Obama souhaite prendre un « nouveau départ entre les musulmans et les Etats-Unis (…) fondé sur l’intérêt et le respect mutuel (afin) de mettre fin à un cycle de méfiance et de discorde ».
Tout en soulignant que les américains avaient profondément été touchés par les attentats du 11 septembre 2001, Barack Obama a tenu à souligner sa véritable connaissance du monde musulman et de l’Islam. Mais le président américain ne s’est pas contenté de rappeler son attachement à cette religion, il a également cherché à démontrer que de nombreux défis communs attendaient les musulmans et les Etats-Unis (exemple : combattre l’extrémisme sous toutes ses formes).
Barack Obama a également tenu à clarifier sa position sur de nombreux sujets d’actualité :
En ce qui concerne la question du conflit israélo-palestinien, le président s’est prononcé en faveur de la création d’un Etat palestinien en réaffirmant que la colonisation israélienne devait cesser. Mais il a également rappelé qu’Israël et les Etats-Unis étaient unis par des liens inaltérables. 
Pour ce qui est de l’Afghanistan, Barack Obama a rappelé que son pays n’avait pas l’intention d’établir des bases militaires permanentes et allait débloquer 2,8 milliards de dollars pour contribuer au développement économique de la région.
Enfin, Barack Obama a tenu à préciser que les Etats-Unis allaient développer des programmes de partenariat, d’échanges et de bourses entre universités américaines et musulmanes. Il a également ajouté que chaque peuple demeurait libre de choisir sa religion et de la pratiquer librement.

Voici les images du discours du Caire de Barack Obama



mardi 2 juin 2009

General Motors : la chute d’un géant


La nouvelle était attendue, mais le choc n’en est pas moins rude. Le premier constructeur automobile américain, General Motors, a déposé le bilan ce lundi. Même si un dépôt de bilan ne signifie pas une liquidation judiciaire, le choc de la faillite de l’industriel aux Etats-Unis demeure considérable.

Il s’agit de la troisième plus grande faillite de toute l’histoire américaine, derrière celle de la banque d’affaire Lehman Brothers en septembre 2009 et de l’opérateur Worldcom en 2002. Il s’agit néanmoins de la plus grosse faillite de l’histoire industrielle américaine. Le constructeur automobile s’est placé sous la protection du chapitre 11. L’administration Obama espère que la période de restructuration du groupe ne dépasse pas les 90 jours.
A la suite de ce dépôt de bilan, quels sont les nouveaux actionnaires de General Motors ? Le Trésor américain prendra 60% de participation, suivi par le fond de couverture santé de l’United Auto Workers (UAW) pour 17,5%, les créanciers obligataires avec 10% ainsi que le gouvernement Canadien associé à la province d’Ontario (12%).  L’administration Obama a également décidé d’accorder 30 milliards d’aides supplémentaires au constructeur pour se réorganiser. Cette somme vient s’ajouter aux 20 milliards de prêts déjà accordés par le gouvernement à General Motors.  Ces 30 milliards proviennent du fond de sauvetage du secteur financier (doté de quelques 700 milliards de dollars) adopté l’automne dernier par l’administration Bush.
Cette période de répit évaluée entre 2 et 3 mois devrait permettre à l’entreprise de se restructurer. Néanmoins, pour assainir ses comptes et envisager une reprise viable, General Motors devra céder de nombreux actifs. C’est le cas notamment de certaines marques mythiques telles que Pontiac, Hummer ou encore Saturn. A l’issue de la procédure, seules 4 marques devraient subsister à l’intérieur du groupe : Chevrolet, GMC, Cadillac et Buick.
En ce qui concerne les licenciements, General Motors devrait se séparer de près d’un tiers de ses effectifs (soit 28 000 salariés) et d’environ quatorze usines. Son réseau de distribution et de concessions devrait considérablement être réduit.
Du côté de Detroit, berceau historique de l’histoire de l’automobile américaine, la presse parle de véritable « choc social ». Etroitement liée à l’activité des trois principaux constructeurs, la ville et l’Etat tout entier du Michigan connaissent déjà le plus fort taux de chômage de tout le pays. La nouvelle de la faillite de General Motors ne devrait pas arranger la situation…
Pour en savoir plus :
- notre article sur la procédure du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites.